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La Reyssouze, un cours d’eau bressan

Par Habib Essanhi
Le 09/04/2023 - 09h00

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Affluent en rive gauche de la Saône et sous-affluent du Rhône, la Reyssouze est la principale rivière de la Bresse, dont elle irrigue les prairies. Mais qui se rappelle encore qu’elle alimentait jadis une trentaine de moulins ? Embarquons ensemble au gré de l’histoire de la rivière.

La Reyssouze, de la source à la légende

Un parcours tranquille

La Reyssouze voit le jour à 285 mètres d’altitude au sud-est de Bourg, dans le village de Journans situé au pied du Revermont. La source, de type karstique en raison de la nature calcaire des lieux, est aménagée. Après avoir traversé Bourg, la rivière épouse définitivement la plaine sud de la Bresse. Son tracé nord-ouest s’infléchit à l’ouest peu avant la confluence avec la Saône, près de Pont-de-Vaux. La Reyssouze a alors parcouru 75 kilomètres.

Drôle de nom !

Le mot « Reyssouze » apparaît dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Cependant, son origine reste obscure. Les étymologies proposées évoquent pêle-mêle des contractions de mots en latin ancien, des origines allemandes, un nom de village du Jura… Leurs significations sont aussi variées que : maison à loger, scie hydraulique, rivière bordée de talus, rivière des forêts, eau tranquille, etc. Ces significations semblent également renvoyer à la fonction qu’ont pu donner à notre rivière les populations qui la côtoyaient.

La légende de la source

Heureusement, il existe une légende liée à la source. Elle nous livre une tout autre version !
Un jour, Madame Reyssouze, habitante âgée de Journans, eut la visite du diable en personne. Ce dernier lui offrit la possibilité d’accomplir un vœu en contrepartie de son âme : la dame pourrait revivre toute sa vie durant ce qu’elle était exactement en train de faire ce jour-là à minuit, moment de l’échange avec le diable. Avare et cupide, la vieille femme accepta en pensant tirer tout le bénéfice de la tractation. Elle sortirait ses pièces d’or, qu’elle disposait dans une cachette, pour les compter. Le vœu s’accomplirait alors et elle deviendrait immensément riche, en passant toute sa vie à compter son or.
Pour multiplier ses chances, elle décida de s’y prendre avec une heure d’avance. Ainsi, à minuit, elle aurait son trésor entre ses mains. Mais peu avant minuit, alors qu’elle comptait son or, elle fut soudainement prise d’une envie incontrôlable. La cloche sonna les 12 coups de minuit, et malgré sa volonté de se contenir, Madame Reyssouze céda. Les yeux exorbités, elle s’épancha comme une fontaine.
La légende retient que le diable tint sa promesse : depuis cette nuit historique, la Reyssouze ne cessa de ruisseler et ruisselle toujours.

Premiers pas

L’ouvrage collectif « 1956-2006 : 50 ans de… Nos années Reyssouze » rend bien compte de ce lieu « pittoresque aménagé par l’homme depuis longtemps. L’eau, très limpide, sort par deux petites ouvertures dans un bassin circulaire en pierres appareillées. Ce bassin est immédiatement suivi d’un autre, rectangulaire, qui a pu servir autrefois de petit lavoir, puis la rivière quitte le pied de la montagne entre deux murs de soutènement, passe sous un petit pont de desserte locale et, à une centaine de mètres de sa source, traverse un grand lavoir à deux toitures bien entretenu. La source ne tarit jamais, l’endroit, très ombragé, reste frais même par les plus grandes chaleurs. Trois cents mètres plus loin, elle actionnait déjà son premier moulin qui subsiste encore… ».

L’implantation de Bourg dans la vallée de la Reyssouze

Les moulins en amont de Bourg

En amont de Bourg, la Reyssouze coule déjà sur une pente faible. Malgré son faible débit, elle alimentait autrefois 6 moulins : un à Journans, un à Tossiat et pas moins de quatre à Montagnat (La Ravary, La Cras, Moulin-Neuf, Noire-Fontaine).

Les moulins à Bourg même

À l’entrée de Bourg, le moulin de Curtafray n’est plus qu’un souvenir. Puis la Reyssouze se divise en deux bras à hauteur du château de Pennessuy : le premier, appelé « basse Reyssouze », constitue le cours originel. La branche ouest a quant à elle été créée par l’Homme : il s’agit du « canal des Moulins ». Ce bief alimentait les moulins dits « de Brou » et « des Pauvres ».
La Reyssouze poursuit ensuite son cours jusqu’au pied de Challes, puis se dirige vers les moulins de Rozières (emplacement de l’actuel champ de foire) et Crève-Coeur. Entre ces deux moulins, se trouvait le moulin des Halles près du pont du quai Groboz ; un bief alimentait des tanneries.

Bourg se centre sur sa rivière

Au XVIIIe siècle, la Reyssouze traverse Bourg dans une ambiance bocagère de prairies et de haies. Un liseré d’arbres matérialise son cours. Le coeur de la ville – et notamment la paroissiale primitive, puis le monastère au XVIe siècle – s’est développé autour du village gallo-romain de Brou, lui-même implanté au bord de la rivière.
Si la vie religieuse rythme le Moyen Âge, et conditionne donc l’enracinement des habitants, c’est bien à la plaine fertile de la rivière que nous devons l’implantation du centre de Bourg actuel. En effet, située entre le Revermont et la Saône, la vallée de la Reyssouze est très large (2 à 3 km). Elle se rétrécit néanmoins à environ un kilomètre près du centre de Bourg. Cela rend plus facile la surveillance et la défense des environs, notamment des voies de passage qui empruntent la vallée. De plus, la rivière est plus aisément franchissable dans cette partie de la ville.

Une vallée sous surveillance

Deux châteaux voient ainsi le jour sur chaque promontoire afin de surveiller la vallée. Autour du château de Bourg, la bourgade burgienne prend forme, le développement de cette dernière bénéficiant des échanges commerciaux avec Lyon.
Au XVIIIe siècle, le château de Challes est relié à la bourgade de Bourg par une avenue bordée d’arbres le long du cours d’eau.

Des inondations qui relèvent du passé

L’entretien inexistant de la rivière, des moulins et des biefs, ainsi que le non-respect des règles de construction par les meuniers provoquent d’importantes inondations au cours des XIXe et XXe siècles à Bourg. La dernière remonte à 1954, alors que des travaux de canalisation de la rivière sont en cours de réalisation. Les eaux sont alors poussées dans les quartiers bas de la ville, qui sont inondables : champ de foire, rue Charles-Robin, pont des Chèvres et route de Ceyzériat.
L’achèvement des travaux de canalisation de la rivière met définitivement fin aux inondations.

Les principaux affluents de la Reyssouze

La Reyssouze compte 75 affluents dénombrés. Cependant, leur faible débit et leur longueur secondaire les cantonnent à l’état de ruisseaux. On peut citer notamment la Léchère, la Vallière, le Jugnon et le Dévorah. Ce dernier prend sa source à Saint-Just, près des bois de Teyssonge, à 243 mètres d’altitude. Il se jette dans la Reyssouze au Pré-Neuf (près du stade Verchère), à 220 mètres d’altitude.
Le Jugnon trouve son origine à Jasseron, à près de 300 mètres d’altitude. Après un parcourt de 17 kilomètres passant par Bourg et Viriat, il se jette dans la Reyssouze à Attignat, à 200 mètres d’altitude. La Vallière, qui vient de Ceyzeriat, se distingue par la cascade de 30 mètres de hauteur qu’elle forme au pied de la ville. Elle et se jette dans la Reyssouze à Montagnat.

Sources

Maurice Brocard, 2000. Bourg de A à Z. Les éditions de la Tour Gile, 702 p.
Ouvrage collectif, sous la direction d’Antoine Rousset et Paul Cattin, 2006. 1956-2006 : 50 ans de… Nos années Reyssouze. 104 p.

Photos

Archives municipales de Bourg-en-Bresse